Ce que je trouve extraordinaire, c'est d'assister à une grande chaîne de solidarité, qui s'étend de nos partenaires et de tous nos sympathisants à nos actions sur le terrain.

TSF : Comment en êtes-vous venu à travailler dans le secteur humanitaire, pour TSF ?

Emmanuel : Après le lycée, je me suis retrouvé un peu par hasard - si on peut dire - dans une école d'ingénieurs, et j'ai choisi le domaine des télécommunications. Je me suis donc retrouvé ingénieur télécom. Lors d'un salon de l'emploi, je suis allé à la rencontre de la Croix-Rouge qui m'a dit qu'il y avait un besoin d'ingénieurs télécoms dans le secteur humanitaire... C'était une découverte pour moi !

Néanmoins, j'avais besoin d'expérience et j'ai donc commencé à travailler dans une entreprise de radio professionnelle (principalement des réseaux de radio de transport public). Après quelques années, j'ai découvert TSF dans un article de journal pendant l'intervention en Libye (en 2011). J'ai commencé à suivre l'actualité de l'ONG, et lorsqu'ils ont ouvert un service civique 1 an plus tard, j'ai postulé et.... J'ai eu la chance de rester !

Non seulement j'ai pu découvrir le milieu humanitaire, l'intervention d'urgence dans le cadre de catastrophes naturelles ou de conflits... Mais c'était aussi l'occasion pour moi de m'orienter professionnellement vers la communication. Ce n'était pas prévu au départ non plus, mais c'est une position dans laquelle je me sens bien au sein de l'ONG.

TSF : Pouvez-vous nous expliquer ce que vous faites au quotidien en tant que responsable de la communication de TSF ?

Emmanuel : Au siège, c'est assez vaste, car il y a la communication de TSF globalement, mais aussi de chaque projet, et les relations avec nos partenaires, qui soutiennent et participent à nos actions.

Il y a donc une part de création de contenu, une part de centralisation des informations de mes collègues au siège ou sur le terrain. Je vois aussi l'engagement de nos partenaires pour nous permettre de mener des actions concrètes sur le terrain.

J'essaie de faire comprendre à tous comment nos actions aident les personnes touchées par des guerres ou des catastrophes, en leur donnant la possibilité de communiquer ou d'accéder à des informations essentielles.

TSF : Qu'aimez-vous dans votre travail ?

Emmanuel : Ce que je trouve extraordinaire, c'est d'assister à une grande chaîne de solidarité, qui va de nos partenaires et de tous nos soutiens, à nos actions sur le terrain.

Au sein du département Communication, nous avons la chance d'interagir avec les partenaires de de TSF et d'apprécier à quel point l'ensemble de l'entreprise est engagé dans les missions. D'autre part, nous recevons des informations de nos collègues sur le terrain, nous avons parfois l'occasion d'aller discuter directement avec nos ONG partenaires ou les personnes touchées, et nous avons ainsi une vision directe de ce que TSF apporte ; mais notre action n'est jamais isolée ! Et souvent notre action s'inscrit, soutient ou complète une initiative commune. Il y a toujours d'autres initiatives, locales ou internationales, qui travaillent ensemble pour aider les personnes touchées par la crise.

Nous savons que la communication peut faire une différence dans la vie des personnes qui traversent une crise, et c'est ce qui donne un sens à notre travail.

TSF : Quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés ?

Emmanuel : Ce qui m'interpelle dans le travail humanitaire, c'est qu'il n'est jamais terminé. Il est vrai que lorsque nous répondons à une crise, nous pouvons voir les résultats concrets de la façon dont notre action a aidé les gens. C'est utile et c'est également important dans une perspective de responsabilité. Cependant, nous savons que la crise, la plupart du temps, se poursuivra ! Et de nouvelles crises surgissent régulièrement.

Je dirais que travailler dans le secteur humanitaire est une expérience qui rend humble, car nous sommes toujours confrontés à de nombreuses situations difficiles auxquelles sont confrontées tant de personnes dans le monde. Nous aimerions les aider tous, mais ce n'est pas si simple !

Il m'a fallu du temps pour mesurer l'importance de l'aide que nous pouvons apporter, à notre échelle. Nous ne pouvons pas changer ou résoudre la situation à laquelle les gens sont confrontés, qu'il s'agisse d'une guerre, d'un contexte migratoire ou d'une catastrophe. Mais nous savons que la communication peut faire une différence dans la vie des personnes qui vivent cette situation, et c'est ce qui donne un sens à notre travail.

TSF : Jusqu'à présent, quelle a été l'expérience la plus mémorable de votre carrière humanitaire ?

Emmanuel : Je dirais que je me souviens de quelques beaux visages rencontrés lors de missions, des personnes qui m'ont étonné par leur énergie, leur force, dans des situations souvent difficiles.

Je me souviens d'une jeune Irakienne, Doaa, que nous avions engagée pour mener des activités ludo-éducatives avec des enfants après la prise de Mossoul par Daech en 2014. Elle avait conservé le matériel du projet lors d'une évacuation d'urgence du camp où nous travaillions à l'automne. En plus de ses affaires, elle avait emporté dans un autre camp le matériel nécessaire aux activités, qui était transportable mais représentait néanmoins un poids supplémentaire.

Elle était étudiante en médecine et devait faire plus de deux heures de bus chaque jour pour assister à ses cours. Sa perspective, après la crise, était de reprendre ses études dans une université encore plus éloignée. Dans des conditions qui auraient pu conduire au découragement ou à la résignation, elle a fait preuve au contraire d'une détermination et d'une honnêteté qui m'ont profondément marqué.

TSF : Qu'est-ce qui vous motive à continuer à travailler dans l'humanitaire ?

Emmanuel : Des histoires comme celle de Doaa donnent du sens à mon travail. Et à la Direction de la Communication, je peux rendre compte de situations bouleversantes, parfois révoltantes. Je vois des réseaux de solidarité entre partenaires, humanitaires, initiatives locales, et j'essaie de mettre en valeur cette coopération face à la crise.