Bienvenue dans le numéro 107 de l'the Call to Comms!

Cette semaine, nous rencontrons Ximena Mendieta Escalante, une chercheuse qui collabore avec le Centro Latam Digital. TSF collabore avec ce centre dans le cadre de son travail sur la sécurité numérique des personnes en déplacement au Mexique. 

Ximena explique quels sont les risques auxquels les personnes en déplacement sont confrontées en ligne, pourquoi la sécurité numérique est particulièrement importante pour elles et comment elle peut être mise en œuvre grâce à la collaboration et à la création d'espaces numériques sûrs et empathiques. Elle parle également de l'atelier sur lequel elle travaille actuellement, dans le cadre du projet de sécurité numérique de TSF.

Cet entretien a été édité par souci de concision et de clarté.


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L'accès à l'internet est essentiel pour les personnes en déplacement, mais elles sont aussi particulièrement exposées aux risques en ligne. TSFcampagne "Sécurité numérique"de TSF vise à réduire les difficultés d'accès et d'utilisation des services en ligne par les communautés de migrants dans les centres d'hébergement, ainsi que leur exposition aux dangers psychologiques et physiques associés à Internet.

Pouvez-vous vous présenter ?

"Je m'appelle Ximena. Je suis une chercheuse spécialisée dans l'immigration, la technologie et le genre. Ces dernières années, j'ai collaboré avec le Centro Latam Digital, un centre de recherche indépendant. Nous générons des connaissances sur les pratiques et les politiques numériques qui favorisent un développement social et économique équitable et inclusif en Amérique latine.

Pouvez-vous nous parler des ateliers que vous avez conçus ?

Au cours de nos recherches, nous avons remarqué qu'il y avait un énorme manque d'information concernant l'utilisation de la technologie et la migration, car les migrants ont généralement d'autres priorités, comme trouver de la nourriture, un abri, etc. Nous avons donc commencé à organiser un atelier au cours duquel nous donnons aux migrants des informations de base sur la manière dont ils peuvent naviguer sur Internet en toute sécurité. 

Nous avons ensuite pris contact avec TSF pour développer ce nouveau projet appelé Secure Connectivity. L'objectif de cet atelier est de renforcer les compétences en matière de sécurité numérique du personnel des centres d'hébergement, afin qu'il puisse prévenir et répondre aux risques en ligne tout en accompagnant les personnes en mobilité dans des espaces sûrs et empathiques

Il couvre la culture numérique et la sécurité, la navigation sécurisée, la protection de la vie privée et des appareils, les premiers secours numériques, l'accompagnement numérique empathique, la désinformation et les récits positifs. 

"Il ne s'agit pas seulement d'enseigner des compétences techniques, mais aussi d'instaurer la confiance et de permettre aux migrants de faire des choix éclairés en ce qui concerne leur vie numérique.

Quels sont les risques en ligne encourus par les personnes en déplacement ?

La technologie est devenue essentielle pour les migrants. Ils utilisent des téléphones portables pour communiquer avec leurs proches et accéder à l'information. Mais il existe plusieurs risques :

  1. Surveillance et suivi. Certaines applications permettent de suivre les immigrants à leur insu, par exemple CBP One, Instagram ou Facebook. 
  2. Perte, vol ou confiscation de l'appareil. Les migrants ont des informations sur leur téléphone. La perte de leur appareil peut entraîner une perte de connexion et une exposition au risque : le voleur peut appeler leurs contacts ou utiliser leurs documents d'identité personnels. Parfois, les migrants ont besoin des preuves qu'ils ont sur leur téléphone pour demander l'asile. 
  3. Les logiciels malveillants, l'hameçonnage et l'ingénierie sociale, comme les systèmes numériques frauduleux, les fausses offres de travail ou de transport, ou les escroqueries. 
  4. Chantage. Des personnes les harcèlent : si elles ne donnent pas d'argent, leurs photos personnelles seront diffusées. Cette pratique est plus fréquente chez les femmes et les communautés LGBT.
  5. L'un des risques les plus importants est la désinformation, la désinformation et la malinformation. Nous avons connaissance de cas où des migrants ont été informés que quelque chose allait se produire, par exemple l'ouverture d'une frontière, et lorsqu'ils s'y rendent, ils peuvent se faire kidnapper. 

Comment la sécurité numérique peut-elle être mise en œuvre pour les personnes en déplacement ?

La mise en œuvre de la sécurité numérique pour les personnes en déplacement nécessite une combinaison de formation pratique et d'outils accessibles, ainsi qu'un accompagnement empathique. Car il ne s'agit pas seulement d'enseigner des compétences techniques, mais aussi d'instaurer la confiance et de permettre aux migrants de faire des choix éclairés concernant leur vie numérique, parce que nous ne pourrons pas rester sur place tout le temps. 

Sur la base de notre expérience et des conclusions de TSF et de Centro Latam Digital, nous pensons qu'il existe trois niveaux d'action.

  1. Renforcer les capacités locales et la sensibilisation. Aider les migrants à protéger leurs données et aborder la sécurité numérique avec empathie et attention.
  2. Concevoir des pratiques de sécurité contextuelles à faible barrière. Les abris peuvent partager une connexion Wi-Fi sécurisée ou des endroits où ils peuvent recharger leur téléphone.
  3. Disposer de protocoles internes pour gérer les incidents numériques sensibles. Les bénévoles dans les refuges peuvent partager des informations avec les migrants sur ce qu'il faut faire. Du côté universitaire, nous pouvons créer des ateliers et des espaces où nous pouvons aider les refuges dans leur réponse.
"Pour les personnes en déplacement, la connexion numérique peut faire la différence entre la vulnérabilité et la résilience.

Quel rôle joue l'inclusion numérique dans la vie des migrants aujourd'hui ?

L'inclusion numérique n'est plus facultative. Elle est fondamentale pour survivre. Pour les personnes en déplacement, la connexion numérique peut faire la différence entre la vulnérabilité et la résilience. Les téléphones portables sont désormais des outils essentiels pour la migration. Lors d'entretiens avec des migrants, beaucoup ont déclaré qu'ils étaient très importants pour les réseaux familiaux, l'aide humanitaire et l'information en temps réel.

Cette même connectivité peut les exposer à la surveillance, à la fraude et à l'exclusion si elle n'est pas associée à des pratiques sûres et inclusives. De notre point de vue, je dirais que [les téléphones mobiles] jouent quatre rôles très importants pour les personnes en déplacement. 

  1. Accès à l'information et à leurs droits. Accès aux routes, aux changements de frontières, à la procédure d'asile ou aux abris disponibles. 
  2. Connexion et résilience émotionnelle. La connectivité est une forme de soins et de soutien émotionnel, qui permet aux personnes de rester en contact avec leur famille et leur communauté. Elle réduit l'isolement lors de parcours incertains. 
  3. Participation économique et sociale. Les outils numériques peuvent offrir des possibilités de travail à distance, d'envoi de fonds et d'apprentissage en ligne. Ils leur permettent parfois de subvenir à leurs besoins et d'apporter une contribution économique même lorsqu'ils sont en transit.
  4. Visibilité, protection et autonomie. L'inclusion numérique permet aux migrants d'exercer leur pouvoir, ils nous aident donc à documenter les abus, à partager leurs histoires et à accéder aux mécanismes de protection.

Mais, là encore, la visibilité sans la sécurité peut entraîner de nouveaux risques. La numérisation inclusive doit s'accompagner de cadres de protection de la vie privée et de responsabilité qui respectent les migrants."


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